Il y a quelques mois, Mme Alexandra Mihai, Professeur adjointe en matière d’innovation de l’enseignement à l’université de Maastricht publiait 12 idées pour rafraîchir son enseignement en moins de 10 minutes.Nous en avons repris huit et rajouté une neuvième. Toutes conviennent à l’enseignement explicite.

PREMIER CONSEIL : INTERAGIR AVEC LES ÉLÈVES AVANT LE COURS

 Il est vivement recommandé de renforcer le lien avec tous les élèves, y compris avec ceux qui nous plaisent moins. Le faire avant le cours nous paraît être une bonne proposition mais à une nuance près. Quand on travaille dans des classes difficiles, il vaut mieux placer ces discussions informelles avant l’entrée en salle plutôt qu’avant le début du cours. Pourquoi ? Parce que le rituel d’entrée en classe est aussi important que le rituel de début de cours.La ritualisation de l’entrée en salle permet, précisément, de demander aux élèves de franchir un par un le seuil de la salle en saluant et en étant salué par l’enseignant·e.  

BÉNÉFICES DU RITUEL D’ENTRÉE EN SALLE 

Lors de cette première prise de contact, l’adulte a la possibilité de s’attarder avec un élève plutôt qu’avec un autre, d’ouvrir un bref échange informel avec lui. L’adulte peut prendre le risque que l’échange ne se déroule pas comme prévu. S’il se heurte à une attitude de mauvaise humeur, ce n’est pas grave puisque le reste des élèves n’entend pas, ni ne voit forcément ce qui se passe. En outre, selon ce qu’il entend, l’adulte peut demander à l’élève d’attendre dans le couloir pour continuer brièvement la discussion pendant que le reste de ses camarades s’installent. Si l’imprévu provoque un certain flottement, ce n’est pas très grave non plus puisque l’adulte peut ensuite reprendre la classe en mains au moment du rituel de début de cours. Une telle manière d’agir lui garantira un fort degré d’attention et de concentration. 

DEUXIÈME CONSEIL : PROPOSER AUX ÉLÈVES LE PROGRAMME DE LA LEÇON SUR UN TABLEAU D’AFFICHAGE. 

Recommandation judicieuse pour la principale raison que les élèves comprennent d’entrée de jeu où l’enseignant·e veut les conduire et comment iel veut le faire. Cela dit, l’enseignant·e doit consentir à s’attarder sur un sujet lorsqu’iel constate que les élèves souhaitent ou ont besoin de davantage d’explications que prévu. Et surtout lorsqu’il s’agit d’une notion fondamentale dont la compréhension est indispensable pour la suite de la séquence. 

TROISIÈME CONSEIL : LA RÉACTIVATION DES CONNAISSANCES OU DES PRÉREQUIS.

 En enseignement explicite, ce conseil va même plus loin. Au début d’une séquence, quand un·e l’enseignant·e constate que des prérequis importants font défaut pour un certain nombre d’élèves, iel prend sur lui de réenseigner ces notions. Mieux vaut le faire à ce moment-là plutôt que d’avoir un groupe d’élèves qui ne peut comprendre la nouvelle matière en raison de lacunes lexicales ou procédurales. 

QUATRIÈME CONSEIL : PROJETER UNE IMAGE OU UNE CITATION PARTICULIÈREMENT MARQUANTE

Proposer aux élèves une photo, une image, une citation particulièrement marquante en lien avec le sujet contribue sans aucun doute à marquer les esprits, à susciter admiration ou controverse. L’attention des élèves s’en trouvera stimulée. Ils pourront être impressionnés pendant des semaines par la proposition de l’enseignant·e

CINQUIÈME CONSEIL : QUE LES ÉLÈVES S’EXPRIMENT SUR LEURS MEILLEURES MANIÈRES D’APPRENDRE

L’adulte ne doit pas croire que tous les étudiant·e·s ont une connaissance suffisante des meilleures stratégies d’apprentissage. Il lui faut donc en parler, proposer des échanges, voire des débats sur cette problématique. D’autant que les stratégies varient d’une matière à l’autre, ne sont pas identiques selon que l’on s’efforce de comprendre les contenus, de les exercer ou de les retenir. Un spécialiste de l’apprentissage comme Pierre Vianin recommande de consacrer jusqu’à un tiers de l’enseignement à la problématique des méthodes de travail lorsque l’on se trouve face à une classe d’élèves connaissant des difficultés d’apprentissage.

SIXIÈME CONSEIL : PROPOSER UN ENSEIGNEMENT ESPACÉ

L’enjeu d’une bonne séquence étant de faire passer la nouvelle matière dans la mémoire à long terme, l’adulte qui se soucie de faire réussir un maximum d’élèves se charge de les faire revoir les contenus de manière régulière. Il mettra au programme des moments de révision d’abord rapprochés, puis de plus en plus espacés. Mais comme les nouvelles matières s’accumulent, il prévoira des moments de révision à une fréquence la plus régulière possible. Les élèves s’habitueront ainsi à adopter un dispositif de révisions systématiques assorti d’astuces pour ne pas perdre trop de temps à le faire. 

SEPTIÈME CONSEIL : DONNER LA PAROLE AUX ÉTUDIANTS

Quand on peut donner son avis, exercer une influence sur la séquence, on se sent davantage impliqué et son attention augmente. Il me paraît ainsi très positif de laisser un espace de parole aux élèves. J’ajoute qu’il y a manière et manière de le faire. L’enseignant·e efficace doit assumer son rôle de professionnel de l’éducation et commencer par proposer des contenus, garder le lead sur la conduite du cours. Avec un tel positionnement et un tel choix de la manière d’enseigner, il peut – et doit même – offrir des moments d’échanges et de parole. Celle-ci s’exprime lors de la pratique interactive (ou pratique dirigée) et peut s’adresser soit à l’enseignant·e soit à un camarade de classe lors des échanges en paires d’apprenants. La proposition de demander aux élèves de suggérer à l’enseignant·e une ou deux questions du test ou de la récitation à venir me paraît également positive.

HUITIÈME CONSEIL : EFFECTUER UNE SYNTHÈSE

C’est ainsi que nous interprétons le conseil de boucler la boucle. Rappeler ce qui a été vu, mettre en évidence les éléments essentiels à retenir peut se faire en très peu de temps par l’enseignant·e, à la condition toutefois qu’iel mette en garde les élèves sur l’aspect provisoire de ce dispositif. Iel se réserve la possibilité de diffuser par écrit les éléments essentiels d’une séquence une fois qu’iel jugera le moment utile.

L’adulte peut parfaitement demander à un·e élève (choisi·e parmi les plus capables), de proposer sa propre synthèse. A charge pour l’enseignant·e d’abonder dans son sens ou alors de proposer des compléments.

NEUVIÈME CONSEIL : PRATIQUER UN RITUEL DE FIN DE COURS

L’auteure ne parle pas de ce rituel mais nous le faisons en pleine connaissance de cause. Finir un cours par une série de gestes consistant à ranger correctement ses affaires et sa place de travail, à dire au revoir à l’enseignant·e, à se lever et à quitter la classe calmement favorise un climat de sérénité et de respect. Quand la pratique s’est installée dans une majorité de classes, l’ensemble d’un établissement y trouve un bénéfice concret, visible, presque palpable. A l’heure où la lutte contre le harcèlement représente un défi, c’est un grand pas de fait vers davantage d’harmonie.

SITES ET OUVRAGES CONSULTÉS

Bissonnette, S., Gauthier, C., Castongay, M. (2017) : L’enseignement explicite des comportements. Pour une gestion efficace des élèves en classe et dans l’école, Chenelière Education, Montréal.

Gauthier, C., Bissonnette, S., Richard, M., Castongay, M. (2013) : Enseignement explicite et réussite éducative. La gestion des apprentissages. Montréal, Bruxelles : ERPI, de Boeck.

Mihai, A. (2021). 12 ideas to refresh your teaching in less than 10 minutes

https://educationalist.substack.com/p/12-ideas-to-refresh-your-teaching (consulté le 28.01.22)

Richoz, J.-C. (2018): Prévenir et gérer l’indiscipline dans les classes primaires et secondaires, Favre, Lausanne.

Vianin, P. (2020). Comment donner à l’élève les clés de sa réussite ? L’enseignement des stratégies d’apprentissage à l’école. Louvain-la-Neuve : De Boeck Supérieur

Virat, M. (2019) : Quand les profs aiment les élèves, Odile Jacob, Paris.

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